Il faut savoir tirer les conséquences de son incompétence...

Cela faisait maintenant plus d'une heure que le regard de la guerrière était rivé sur une pièce de parchemin. Les yeux brillant de mille diamants, elle ne se sentait pas le courage d'y coucher les propos qui lui passèrent alors en tête.
Un volet claqua soudain contre le mur, la faisant tressaillir d'effroi!
Flanquée du symbole de la guide, la cape, posée à même ses genoux, recevait les assauts répétés de ses mains crispées ...
Prenant une grande inspiration, elle se saisit de sa plume, la trempa dans l'encre, et se décida à entamer à contre coeur la rédaction qu'elle s'était promise d'effectuer quelques heures plus tôt.


A mes compagnons d'infortune,


Je me souviens encore de ces mots qui furent les miens, lorsque je me mis en quête des personnalités que je souhaitais voir participer à un grand projet : la mise en place d'une organisation destinée à ramener à la raison et par les armes, les élites d'un Ordre puissant et profondément implanté à travers le monde.
La sélection ne fut pas toujours facile, et distinguer le bon grain de l'ivraie aurait sans peine pu constituer le Treizième des Travaux d'Hercule ... Entre les guerriers vicelards, se prenant à rêver d'une amourette avec deux jumelles, et les amateurs de curiosités, déceler les véritables conquérants de l'impossible aura réclamé un certain doigté ... Mais, au final, notre petite communauté paraissait plutôt homogène, et la qualité de se membres faisait réellement ma fierté. En ce temps-là, j'étais véritablement à mille lieux de m'imaginer que je serais la première à vous abandonner le long de la route ...

Seulement ...

... Seulement, il m'est devenu de plus en plus difficile de concilier mes responsabilités au sein de la guilde avec mes liens gémellaires : mes soeurs me sont aussi indispensables que l'air que je respire, et je ne suis jamais pleinement heureuse que lorsqu'il m'est permis d'embrasser l'une sur la joue et l'autre sur les lèvres.

Mais en dehors même des liens du sang, mon idylle avec l'une d'elle m'aura convaincue de mon inaptitude à tirer la guilde de l'avant. Non parce qu'il s'agit de Nymphea, et qu'elle est ma soeur. Mais parce qu'en me faisant découvrir l'Amour avec un grand "A", je me suis rendue compte que mes priorités s'étaient soudainement inversées, que jamais je ne pourrais sacrifier cette relation priviligiée sur l'autel des responsabilités guildiennes ... L'idée d'organiser nos horaires en vue de sorties collectives m'avait été dictée par la raison, et je m'exprimais alors en tant que responsable. Mais mon coeur, lui, ne put se résoudre à l'admettre. Non pas que ces virées m'indiffèrent, bien au contraire. Je prends un plaisir énorme à partir en vadrouille avec vous ... Mais devoir imposer des horaires pour le travail et les câlins m'est vite apparu comme une entrave inadmissible à mon bonheur, à mon droit à vivre pelinement ma vie de femme, de femme amoureuse.

C'est drôle, mais je me rappelle avoir déjà mis en garde les candidats à l'entrée dans la guilde à ce sujet-là, voilà deux ans : une aventure épique, mais pleine de contrainte, du fait des liens de sang très étroits qui unissent Alexia à Marina, de leur besoin d'être ensemble et de se voir le plus souvent possible. Faire avancer la guilde était déjà devenu ardu, pour ceux qui s'en souviennent. Ajoutons à cela qu'Alexia, qui avait pourtant promis à Marina de ne jamais tomber amoureuse tant que les Mursaats ne seraient pas chassés du Blanc Manteau, n'aura rien trouvé de mieux à faire que de craquer pour une autre femme, et pas n'importe laquelle ...

L'addition devenait trop salée.
Je sentais ma passion devenir prisonnière de ma raison.

Moi qui me pensais adulte, et douée d'un minimum de sagesse, me découvrais gamine, incapable de tolérer la moindre contrainte, la moindre entrave à ma relation avec mes soeurs.
Déjà enfant, je jouais dans les bois, toute seule, avec mes jouets, mes poupées, jusqu'à ce que la nuit tombe, et que j'en vienne à m'y perdre, devant attendre que mes parents me retrouvent au son de mes pleures.
J'ai toujours cherché à profiter des meilleurs moments que m'offrait la vie sans me soucier des conséquences ...


Mon départ ne répond qu'à un constat d'échec, d'impuissance, le sentiment d'avoir occasionné une immense déception par mon comportement.
Si je quitte la guilde que j'ai fondée avec Marina, c'est la mort dans l'âme, croyez-le bien ... Je ne suis pas une adepte des faux-semblants, et la sincérité est une qualité que je prise entre toutes.
Maintenant, cela ne signifie pas pour autant que nous ne nous reverrons plus ... Je ne fais que me libérer de cette petite bague qui m'enserrait jusqu'à présent la patte, déployant mes ailes sur toute leur envergure, et m'élançant du haut d'une falaise pour prendre un nouvel envol ...


Alexia


La lettre signée, la jeune femme, dans un ultime soupir, roula le parchemin sur lui-même, et l'entoura d'une double épaisseur de ficelle. Approchant la bougie d'une main tremblotante, elle y déposa quelques gouttes de cire, puis chercha la chevalière de son père pour sceller définitivement la missive.
Refermant lentement la porte de sa chambre, elle descendit les marches en prenant soin de faire le moins de bruit possible, menaçant au passage d'un coup de bottine bien placé, le lynx qui prenait ses aises au bas des marches.
Arrivée dans le grand hall, elle vérifia qu'elle était bien seule dans la pièce, avant de se diriger vers la table la plus au centre. Là, elle ressortit sa cape de guilde, pliée au carré, et la posa délicatement sur le dessus, le parchemin trônant au coeur des ondulations écarlates.

Sa besace sur le dos, elle enjamba l'entrée de la taverne, et s'avança en direction de sa monture, non sans avoir préalablement jeté un dernier regard en arrière.
Là, elle repensa avec émotion aux rencontres qu'elle y avait faites ces deux dernières années, aux personnes avec lesquelles elle s'était liée d'amitié, voire fâchée, parfois. Des images de profonde nostalgie lui emplirent la tête, et elle revit les instants les plus magiques de sa courte existence défiler en quelques secondes devant elle.
Réprimant avec difficulté une larme rebelle qui menaçait de lui surgir du coin de l'oeil, Alexia sauta sur son cheval, tira sur la bride avec rage, et s'éloigna vers l'horizon, le coeur envahi par la mélancolie ...

C'est le coeur en peine que le guerrier acheva de lire la lettre de son amie. Alexia avait quelque peu des difficultés à allier sa vie privé et son devoir envers la guilde mais cependant elle le faisait chaque jour ... Ceux qui réclamèrent plus d'elle ne peuvent que s'en mordre les doigts ...

Elle était la, présente pour tous, son petit sourire, ses toux a répétition, son allure sympathiquement hautaine tout de cette femme faisait qu'elle s était rendue terriblement attachante.

Une petite larme vint à paraître sur le visage de Maxyim, les souvenirs de la jeune femme au sein de la guilde étaient tous d'agréables moments ...

Mais privé cette jeune femme de sa liberté, en l'enjoignant de rester bon gré mal gré, eut été une bêtise et bien que le départ d'Alexia affecta énormément le petit noble il comprenait et acceptait cette décision ...

HRP Alexia que d'agréables moments en ta compagnie Mon plus beau souvenir de toi au sein de la guilde sera et restera notre rencontre hasardeuse avec Alesia et Sky Zo Phrenie les soins particuliers de ce rôdeur etc ...
Si tu viens à changer d'avis je pense pouvoir parler au nom de tous et te dire que tu seras de nouveau la Bienvenue chez TOI !!!!

*Ferma les yeux et se remémora avec délice la scène croustillante du découpage de "viande pourrie"*

Nous avions passé la matinée entière dessus ... J'étais littéralement envoûtée par la tournure prise les évènements ... Au passage, je loue votre slience à propos de cette histoire, même si je ne serais pas outre mesure étonnée d'apprendre que le patriarche en ait depuis eu vent *clin d'oeil taquin*

Sinon, il est encore trop tôt pour parler de changer d'avis, vous ne trouvez pas ?
Libérée de mes obligations, je puis à présent vous voir à l'envie, sans tout le stresse que j'avais jusqu'à présent à supporter pour m'assurer que je jouais encore correctement mon rôle parmi vous. Seulement, ce rôle, je ne parvenais plus à le tenir ...

Maxyim, vous êtes un compagnon adorable, et si je passe parfois autant d'heures en votre compagnie, ça n'est pas sans raison : )

Ciaelü rencachetta la lettre dans son enveloppe, puis la déposa sur le petit fauteuil en velours de la salle commune de l'Ordre. Les yeux larmoyants, elle fixa la petite missive avec un regard méprisant. La jeune femme s'agenouilla près de la cheminée, un souffle d'air chaud caressant sa peau avec douceur. Elle regardait le feu qui y avait été allumé captivée par les flammes qui tournoyaient, folles, dans ce petit encadrement de pierre, lacérant de coup ce qui leur avaient servi de combustible.
Ciaelü détourna son regard de la cheminée sentant une lègere odeur de jasmin. Reprenant ses esprits, elle grimaca en repensant à cette lettre dont sa passion pour le feu l'avait libéré quelques minutes, libérée un instant de ces mots, ces souvenirs lacérants qui revenaient brûlant une à une ses envies de sourire et d'éprouver un quelconque bonheur. Ciaelü sortit dehors lentement, comme dubitatif et se mit à cracher voulant se séparait de ce goût amer qui la torturait a présent...

Bon, ben, voilà... C'est le genre de truc qui est vraiment extrèmement chiant, surtout si la personne qui s'en va est, en l'occurence, l'une des personnes des plus matures, des plus sympathiques, que non seulement la guilde ai connu mais surement aussi dominant de loin tout ces RPouillards qui se croient dignes d'une telle éloge. Je suis super super décu, mais Maxyim l'a bien dit; il faut accepter cette décision. Je l'accepte et avec toute la peine que je peux éprouvé en ce moment.

En mot de fin, on va dire quoi ? Tant pis ? Dommage ? Non, le mieux ce serait de rien dire et peut-être se détourner d'Alexia en se remettant, nous, en question. En tout cas, c'est clair et net, ne prends pas ton temps pour revenir !

Darius Sombelame venait à peine de quitter les lieux qu'une ombre familière apparut dans l'entrebaillement de la lourde porte de chêne.
Apercevant la jeune femme prostrée sur le sol, le visage enfoui sous un linge de couleur rouge, elle se précipita à sa hauteur, pour constater, une fois sur place, qu'elle avait rejoint les bras de Morphée, les doigts crispés sur une lettre qui ne lui était pas inconnue, et qu'elle s'employa à retirer délicatement de ses mains.
Se rendant compte qu'elle ne portait plus sur elle qu'une fine nuisette de satin, Alexia déposa sur sa soeur la cape dont elle avait pourtant décidé de se séparer quelques heures plus tôt, cette cape à présent ointe en maints endroits des larmes de sa tendre moitié ...

Alexia, à genoux près de sa soeur, et s'adressant à son corps inerte, un sourire au coin des lèvres : Est-ce ainsi qu'une femme de haut lignage se présente dans une taverne, mon coeur ?

Voyant l'heure tourner, et craignant de voir débarquer à tout moment dans l'établissement une meute de pochards avérés, la guerrière glissa ses bras sous sa jumelle, et la souleva avec une infinie précaution, se chargeant ensuite de remonter les escaliers en veillant bien à ne rater aucune marche.
Sa porte étant restée grande ouverte, Alexia en profita pour déposer à même le lit son précieux colis, alimentant au passage le feu de cheminée d'une grosse buche.

Alexia, assise à côté d'elle, lui caressant tendrement la joue du revers de sa main, tout l'amour du monde pouvant se lire en cet instant dans ses grands yeux bleus : On n'a pas idée de se déplacer dans un tel endroit les pieds nus, alors que le parquet lui-même craquelle de toute part sous l'effet du froid ...

Joignant le geste à la parole, la guerrière retira ses gants, et prit les pieds gelés de sa soeur entre ses doigts, les massant avec délicatesse, puis les posant contre sa poitrine, pensant peut-être les réchauffer à la flamme ardente qui consumait son coeur amoureux depuis déjà deux longues années ...

Alexia, le regard bordé de larmes contenues : Pardonne-moi, mon ange ... Pardonne-moi de t'avoir causé une telle frayeur. J'ai ... *toussa* ... Ces derniers jours n'auront pas été faciles à vivre, tu sais. Mais sache que jamais, jamais je n'ai eu l'intention de te quitter!
Tu es tout pour moi. Je veux pouvoir continuer à respirer le même air que toi, essayer de mener un jour une vraie vie de couple aux yeux de tous ... Et peu importe le "qu'en dira-t-on ?"! Ensemble, toutes les deux, nous pouvons renverser des montagnes!


[Note d'Alexia : mon message a été publié quelques secondes après celui de Princess, me plongeant à présent encore un peu plus dans l'embarras : )
Après en avoir discuté à bâton rompu avec ton futur mari, ainsi que ma soeur chérie, j'en suis arrivée à la conclusion que ma décision avait été prise sous le coup de la colère, sentiment que j'avais insidieusement laissé reposer au fond de moi ces derniers jours, et qui n'aura fait que se renforcer au fur à et mesure des reports successifs ... A croire que je suis une très mauvaise cocotte-minute ...
Darius, Ciaelü, merci pour les quelques compliments distillés au travers de vos messages. Ils me redonnent du baume au coeur, en cette froide matinée de décembre.]